Introduction au fantastique Chinois

L'univers repose sur deux principes fondamentaux : le Yin et le Yang. Le Yin est le principe femelle, de l'obscurité, du froid, de l'inertie, de l'humidité. Le Yang est le principe mâle, de la clarté, de la chaleur, du mouvement et de la secheresse. En se séparant, le Yin et le Yang ont formé la Terre et le Ciel. En se recombinant, ils ont donné naissance à toutes les créatures. Cette dualité se retrouve à l'intérieur de chaque être, y compris l'être humain.

Les humains sont donc animés par deux formes d'âmes : l'âme spirituelle et l'âme sensitive, qui coexistent pendant toutes la vie pour se séparer aprés la mort.

Le Yang donne l'âme supérieure ou spirituelle (Hun), composée de trois souffles (ou principes subtils) : le souffle (Chi), l'essence (Jing), et l'esprit (Shen). Au Yin correspond l'âme inférieure ou sensitive (Po) faites de sept passions ou affects troubles et opaques (joie, colère, chagrin, crainte, amour, haine et désir).

Aprés la mort, l'âme supérieure se dissocie de l'âme inférieure, elle quitte le corps et son Shen (esprit) devient un esprit transcendant. Les Shens des grands personnages, dument honorés par des cultes réguliers exercent leur influence bénéfique (culte des ancêtres).

Quand à l'âme sensitive, elle reste dans le corps. Dans la plupart des cas, elle s'éteint et disparait, le corps tombant alors en poussière. Mais si cette force n'est pas épuisée par la mort, elle va se projetter sous forme d'un revenant (ou d'une apparition), ou bien même animer le cadavre (ou un objet cher au défunt). Celle donne un fantôme, qui errerra plus ou moins longuement en attente de sa réincarnation.

Les tombes chinoises ne sont pas rassemblées en champ clos. Les cones de terre des tertres funéraires peuvent se voir un peu partout dans la campagne de Chine, tranformant l'Empire en gigantesque cimetierre et en terrain de jeu pour les revenants et fantômes de toutes sortes.

Les morts rodent autour de leur corps ou reviennent hanter les lieux qui leurs sont familiers. Un objet ayant appartenu au mort, un mot, un geste peuvent susciter une apparition. Les fantomes paraissent réels en tous points. A part en remarquant quelque indice subtil, nul ne peut savoir si il parle à un fantôme ou a une être vivant.

Si le mort est enterré suivant les rites, que sa tombe n'est ni violée ni dérangée, que ses passions sont éteintes au jour de sa mort, il n'a aucune raison de revenir parmi les vivants. Mais les morts malheureux, les morts pleins de passions, les morts sans sépulture viendront inlassablement chercher réparation chez les vivants.

Cette croyance est si forte qu'il était courant qu'un homme victime d'injustice se suicide, car nul ne peut échapper à la vengeance d'un fantôme.

Dans les cas de hantise les plus extrêmes, seul un spécialiste (médium, sorcier Taoiste) pourra savoir exactement ce qu'il faut faire pour appaiser le mort.

Les morts ne sont pas toujours malfaisants : un ancien ami pourra revenir aider, un fantôme auquel on a offert une sépulture pourra être reconnaissant, ou, plus simplement, un fantôme esseulé pourra avoir envie de bavarder.

Les morts sont presque impossibles à reconnaitre des vivants. On dit qu'ils n'ont pas d'ombre en plein jour, qu'ils préferrent l'aube et le crépuscule pour se manifester, qu'ils craignent les feux et les branches de pêchers, les armes de métal et le bruit (d'où les nombreux pétards utilisés dans les fètes nocturnes pour éloigner les revenants). Mais le plus souvent, on ne peut pas vraiment savoir si on parle à un fantôme ou à un vivant.

Et depuis toujours, les morts en attente de réincarnation coexistent avec les vivants, le plus souvent sans heurts, souvent même sans que personne ne les remarque.

Les esprits de la Nature

Les esprits animaux (Yao ou Yaojing) sont souvent ceux qui ont la plus grande force spirituelle. Ils sont généralement métamorphes même si leur forme de base est celle de leur animal.

Ils adoptent volontiers la forme d'une humaine superbe (car la forme humaine est réputée être la plus parfaite de la création ; et les esprits de la nature sont souvent féminins car leur Yin domine). Les Renardes notamment, prennent fréquemment l'aspect d'humaines superbes, elles sont connues pour leur énergie vitale extraordinaire, leur grande intelligence, leur connaissance étendue de la sorcellerie, leur lubricité débridée et leur longévité extrême. Il y a aussi les Mei (esprits de forets et des montagnes volontiers facétieux) et les Wangliang (sortes de gobelins qui nichent dans les rochers et dans les arbres) ; et bien d'autres encores.

Le royaume de Jade (le monde des morts)

Le Ciel et l'Enfer (le Royaume de Jade) sont deux mondes paralèlles au notre, et soumis à la même administration rigoureuse, hiérarchique et tatillonne que l'Empire. L'objet de cette activité infernale, de ses milliers de registres, de listes, et de règlements, est de controller la longévité des humains, qui, comme tout le reste, est prédestiné, et inscrit dans les livres du Ciel et de l'Enfer.

Aussi les émissaires infernaux sont ils nombreux à sillonner la terre pour aller chercher ceux qui doivent mourrir ou pour recruter du personnel infernal. Naturellement, les fonctionnaires infernaux ne sont pas plus insensibles aux pots-de-vins et à la corruption que les Mandarins d'en haut : ils peuvent parfois accorder un répit.